Alain Boyer : Chose promise

La promesse est un acte de parole qui engage celui qui la donne. La thèse ici soutenue est que la promesse, et ses formes plus complexes (pactes, alliances, serments), est un propre de l’homme – et, plus radicalement, que l’unité de l’humanité est fondée dans la capacité à promettre et à respecter ses engagements. Pacta sunt servanda, comme dit le principe romain. La nécessité de respecter sa « foi » apparaît chez des penseurs (Cicéron, Montaigne, Hobbes, Pascal, Locke, Hume, Rousseau, Kant, Nietzsche) dont les doctrines sont pourtant fort différentes. On peut la lire aussi chez des écrivains (Homère, Euripide), des historiens (Hérodote, Tite-Live), dans la Bible, et dans les sciences sociales.
On relit ici la « réfutation de l’Insensé » proposée dans le Léviathan, à la lumière de l’examen du rapport de Hobbes à Machiavel sur la question du respect de sa parole. On s’appuie sur la théorie des jeux pour proposer une nouvelle lecture de l’état de nature hobbesien ainsi que de la « chasse au cerf » de Rousseau : il y aurait, depuis les premiers hominidés, un lien entre chasse et promesse. Sans la promesse, la « tentation du lièvre » est irrésistible. On revisite enfin la question du « resquillage » (free riding) : Aristote, et surtout Hume et Rousseau ont compris cette difficulté, liée au passage, sans fondement naturel, à de grandes actions collectives.
La confiance engendrée par l’échange des promesses est essentielle à toute vie en commun. L’humanité doit conjurer les deux « monstres » que sont la guerre civile et la tyrannie, qui brisent toute confiance. Il faut dépasser cette alternative tragique. La réflexion sur le serment débouche, de manière inattendue, sur une relecture de la question du sacrifice, et également du christianisme au travers de la question du rachat et de ce que l’on appelle ici son « incomplétude ». Finalement, ce sont certaines idées de penseurs aussi divers que Rawls, Popper, Hayek, Arendt, Ricœur, Elster ou encore Agamben, qui se trouvent ordonnées à la thèse selon laquelle la promesse est l’un des fondements de l’identité personnelle aussi bien que le vinculum ultimum societatis humanum, le lien dernier de la société des hommes – la nôtre comme celle des « penseurs sauvages ». Ici, ailleurs, partout, la fides est au fondement de la coopération entre les hommes de parole.
Au début est la parole donnée, mère de toutes les normes.

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