Le socratisme de Montaigne

La vénération que Montaigne porte pour Socrate ne fait qu’augmenter au fur et à mesure de la rédaction des Essais. Loin cependant de participer à la célébration de « Saint Socrate » (Érasme) à l’entendement « plus qu’humain » (Rabelais), il débarrasse le personnage de Socrate des scories métaphysiques dont l’avaient revêtu les penseurs renaissants, pour faire de lui un parangon d’humanité.

Outre le personnage de Socrate, Montaigne réinvente l' »idéal » socratique, un idéal qui se traduit par une nouvelle relation du savoir à la vie humaine. La nescience socratique est réinterprétée à travers un schème pyrrhonien : mais le Pyrrhon de Montaigne, qui ne connaît ni l’indifférence, ni la suspension du jugement, ni l’absence de trouble, n’est-il pas en retour profondément socratique ?
Par un déplacement similaire, le gnosce te ipsum socratique devient chez Montaigne une expérience d’un « moi » singulier, éprouvé tant dans l’essai du jugement que dans l’expérience de la finité du corps.
Enfin, le savoir socratique, au contraire du savoir « doctrinal », entretient l’inquisition au lieu de la clore, restant ainsi ouvert sur la vie de l’esprit.

Ce nouveau rapport au savoir engage enfin un nouveau rapport à la sagesse. Socrate opère la synthèse entre la sagesse stoïcienne, faite d’effort et de raideur, et la sagesse pour ainsi dire « spontanée » du cannibale ou du paysan, voire de l’animal. Cette synthèse entre préméditation et impréméditation, entre exercice de soi et insouciance, culmine dans la meditatio mortis qui constitue le sens le plus fondamental de l’essai montaigniste. Retrouver par l’effort de la vertu la spontanéité perdue de notre nature : c’est peut-être là le mot ultime de la philosophie morale des Essais.

Notre colloque visera à définir ce nouveau socratisme, en s’interrogeant à la fois sur son originalité par rapport aux traditions antérieures et sur son caractère fondateur pour la modernité : le socratisme de Montaigne n’est-il pas aussi, en quelque façon, le nôtre ? Et n’est-ce pas avec Montaigne que Socrate devient la figure tutélaire de la philosophie ?

Directeurs scientifiques :
Thierry Gontier, Suzel Mayer

Comité scientifique : Philippe Desan, Louis-André Dorion, Pierre Magnard, Nicola Panichi, Pierre Servet

Contact :
Valentina Tirloni

Coordinatrice scientifique
Institut de Recherches Philosophiques de Lyon – IRPhiL
18, rue Chevreul – 69007 Lyon
Tél. : 04 78 78 73 94 / Fax : 04 78 78 72 27
valentina.tirloni@univ-lyon3.fr

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Ancien élève de l’ENS Lyon, agrégé et docteur en Philosophie, Thibaut Gress est professeur de Philosophie en Première Supérieure au lycée Blomet. Spécialiste de Descartes, il a publié Apprendre à philosopher avec Descartes (Ellipses), Descartes et la précarité du monde (CNRS-Editions), Descartes, admiration et sensibilité (PUF), Leçons sur les Méditations Métaphysiques (Ellipses) ainsi que le Dictionnaire Descartes (Ellipses). Il a également dirigé un collectif, Cheminer avec Descartes (Classiques Garnier). Il est par ailleurs l’auteur d’une étude de philosophie de l’art consacrée à la peinture renaissante italienne, L’œil et l’intelligible (Kimé), et a publié avec Paul Mirault une histoire des intelligences extraterrestres en philosophie, La philosophie au risque de l’intelligence extraterrestre (Vrin). Enfin, il a publié six volumes de balades philosophiques sur les traces des philosophes à Paris, Balades philosophiques (Ipagine).