Alexis Rosenbaum : Leçons d’introduction à la philosophie des sciences

Comment enseigner ou promouvoir la philosophie des sciences aujourd’hui ? L’examen sérieux des fondements de la science parait exiger un bagage scientifique considérable, et de ce fait dissuasif pour beaucoup de ceux que le système éducatif a étiquetés comme « littéraires ». Mais côté « scientifique », les réticences ne sont pas moins grandes : le praticien des sciences craint souvent de s’engager dans des spéculations philosophiques qui lui paraissent oiseuses, verbeuses ou superflues. De sorte qu’entre la possibilité d’une analyse rigoureuse mais sans profondeur, et la tentation de l’« évocation » excitante mais approximative, la réflexion épistémologique semble placée dans une position inconfortable et peu propice à la réception.

A : Implications philosophiques de la science contemporaine

Pourtant, c’est bien au cœur de la science, et tout particulièrement de la physique, que se posent aujourd’hui dans toute leur acuité certaines des grandes questions de la métaphysique : la nature de l’espace et du temps, la valeur de vérité des représentations humaines, l’ordre ultime des phénomènes naturels. Des questions qui surgissent littéralement de la pratique scientifique contemporaine et dont la réflexion philosophique ne peut faire l’économie. Peut-on encore affirmer que des « lois » gouvernent la Nature, ou bien cette conception est-elle en train de perdre du terrain ? Tous les phénomènes s’enchainent-ils de façon inéluctable, déterministe, ou la science doit-elle désormais intégrer un certain indéterminisme au cœur de ses représentations ? Tout ce qui existe se réduit-il à une combinaison de mouvements matériels, ou la physique quantique nous impose-t-elle de renouveler radicalement nos idées sur la texture du réel ?

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A cette métaphysique brûlante portée par la science s’ajoutent les riches débats portant sur le statut des méthodes et des connaissances scientifiques. La méthode expérimentale est-elle vraiment le seul mode de validation des énoncés prétendant décrire le monde, ou son extension à des domaines toujours plus nombreux n’est-elle que l’expression d’une sorte d’impérialisme des sciences de la nature ? Les savoirs qu’elle engendre sont-ils destinés à atteindre la « vérité » ou seulement l’efficacité sur les phénomènes ? La notion d’objectivité qu’elle véhicule a-t-elle une signification précise ou n’est-elle qu’une sorte de construction collective rassurante ? Les débats restent en grande partie ouverts et évolutifs. Mais dans la plupart des cas, l’approfondissement des connaissances a des répercussions inattendues sur les positions en lice, obligeant le philosophe à s’extraire de son fauteuil et prendre en compte des découvertes ou des résultats scientifiques.

B : La pratique scientifique en débat

Inversement, la pratique scientifique est confrontée à des interrogations qui la débordent et contre lesquelles elle n’est pas toujours pleinement armée. A commencer par les délicates problématiques morales qui hantent le monde de la recherche et que la réflexion épistémologique ne peut certainement pas délaisser, même lorsqu’elle doit pour cela prendre en charge des polémiques dont la teneur subversive n’est pas négligeable. Pourquoi, par exemple, les pratiques réelles des scientifiques ne sont-elles pas toujours à la hauteur des valeurs qui leur sont associées, comme nous l’apprennent l’histoire et la sociologie de sciences ? Est-il vrai que plusieurs disciplines se soient révélées abriter de profonds préjugés « sexistes », ainsi que des philosophes féministes le proclament aujourd’hui avec force ? Le rapide développement des neurosciences porte-t-il en germe la disparition des sciences humaines, comme le craignent nombre de praticiens de ces disciplines ?

Ce sont de telles questions qui agitent aujourd’hui la philosophie des sciences et que cet ouvrage1 propose de présenter, exemples à l’appui, dans un langage simple et accessible. Il s’adresse ainsi à tous ceux qui s’intéressent aux interrogations que suscite la connaissance scientifique, en mettant à leur disposition un socle de connaissances destiné à leur permettre de s’orienter dans les débats contemporains. N’ayant pas de prétention érudite, l’essentiel de l’exposé est conçu pour être appréhendé sans connaissances techniques préalables. Avec le souci constant d’inviter à la réflexion en mettant en relief ce que les questions de philosophie des sciences peuvent avoir d’éclairant ou de formateur pour l’esprit.

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  1. Alexis Rosenbaum, Leçons d’introduction à la philosophie des sciences, ENSTA, 2009
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