Colloque international de philosophie : Se nourrir, nourrir – Politique, éthique et économie des nourritures

Colloque international de philosophie

Se nourrir, nourrir :

Politique, éthique et économie des nourritures

Du 2 au 4 septembre 2025 à Toulouse

Université Jean Jaurès

Le geste de nourrir, acte à la fois quotidien et fondamental, engage des dimensions économiques, sociales, métaphysiques, éthiques et politiques qui se déploient différemment selon les traditions philosophiques et religieuses. De Georg Simmel à Karl Marx, et jusqu’à Emmanuel Levinas, le nourrir apparaît tantôt comme une structure sociale dont le donataire n’est pas réellement le bénéficiaire ou le sens, tantôt comme la manifestation d’une société aliénante, ou encore comme la signification irréductible de la relation à autrui. Simmel souligne la dimension sociale du nourrir : il ne s’agit pas d’une relation entre individus, mais d’un acte traversé par des significations collectives et culturelles, une manifestation de l’interdépendance qui fait communauté et se retrouve privée de sa signification éthique. Dans une perspective marxiste en revanche, le nourrir serait plutôt le symptôme d’une domination économique : sa nécessité biologique devient un instrument de l’exploitation et la charité masque les causes de la pauvreté puisque si chacun recevait la valeur de sa production, personne n’aurait besoin d’être nourri par autrui. Levinas inverse cette approche en restituant au nourrir une signification inter-individuelle et donc une valeur éthique absolue : l’Autre, en tant qu’affamé, m’oblige, faisant du nourrir une condition de l’humanité elle-même. Pourtant, d’autres textes de Levinas font la part belle à la nourriture comme pure jouissance de l’individu, pure intériorité. Elle prend alors une signification de séparation qui précède l’éthique.

Ce colloque se propose d’interroger cette ambivalence du nourrir à travers plusieurs axes:

1. Nourrir et nourritures : entre jouissance et obligation

Si nourrir est un acte qui engage la responsabilité, la nourriture elle-même relève d’une dimension matérielle et sensible, liée à la jouissance du moi. Levinas articule cette dualité entre l’Être jouissant et l’éthique de l’Autre, ouvrant une réflexion sur le rapport entre consommation et responsabilité.

2. Individu, société et économie du nourrir

Le nourrir est-il un fait social structurant (Simmel), une dépendance économique due à une opposition aliénante entre capital et travail (tradition marxiste) ou la manifestation jouissante de la pure intériorité avant de devenir une obligation irréductible face à l’Autre (Levinas) ? Ce questionnement permet d’aborder les perspectives philosophiques, sociologiques et économiques du nourrir, en dialogue avec des penseurs contemporains de la justice et de la solidarité.

3. Droit et obligation, de l’éthique au politique

L’acte de nourrir prend la signification éthique d’une obligation. Mais face à cette obligation y-a-t-il un droit ? Nourrir ne concerne-t-il que celui qui donne dans la manifestation de son obligation ou bien le donataire est-il en droit d’exiger le nourrir ?

4. Corps, faim et sensibilité

Le nourrir touche à la matérialité du corps : la faim, la souffrance et la dépendance d’un côté, la satiété et la jouissance de l’autre. Cette approche permet d’articuler Levinas avec d’autres phénoménologues du corps et de la sensibilité, comme Merleau-Ponty. Elle ouvre également une discussion avec l’œuvre de Simone Weil, dont les écrits sur la faim et la misère touchent directement à notre sujet.

5. Nourriture, économie et écologie

La nourriture est par nature cyclique. Se nourrir c’est ajourner sa mort, se donner du temps, mais peu de temps. Il faut se nourrir tous les jours. Cela ramène-t-il l’économie de la nourriture à son état préindustriel, à l’animal laborans de Arendt ? Ou y a-t-il, au contraire, une explosion de la productivité alimentaire, qui constitue à la fois l’un des moteurs de la crise écologique qui nous menace et l’une des voies possibles pour éradiquer la misère alimentaire ?

À la croisée de la philosophie, de l’éthique et des sciences sociales, ce colloque entend donc explorer le nourrir comme un enjeu à la fois matériel et métaphysique, social et éthique, juridique et politique, à partir d’un dialogue entre différentes traditions de pensée.

Langues du colloque : anglais et français

Propositions de communication en anglais ou en français : un titre, 5 mots clés et un résumé (400 à 500 mots bibliographie comprise). Durée : 30 minutes : 20 minutes + 10 minutes de q&r.

Les propositions sont à envoyer avant le 30 juin 2025 à joellehansel123@gmail.com

Les frais de voyage et d’hébergement des orateurs ne pourront être pris en charge par le colloque.

Organisateurs : Flora Bastiani (Toulouse), Joëlle Hansel (Paris/Jérusalem), Michel Olivier (Paris)

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Romain Debluë est né en 1992. Docteur en philosophie de l’Université Lettres-Sorbonne (« La Révélation de l’être : Hegel et Thomas d’Aquin », sous la direction de M. Emmanuel Cattin), il a publié de nombreux articles, dans le domaine de la philosophie et de la littérature, ainsi qu’un roman. En outre, il a organisé durant plusieurs années un séminaire en Sorbonne consacré aux « philosophes et à la Trinité », dont les actes sont parus sous la forme d’un numéro des Études philosophiques.
Spécialiste de philosophie médiévale, et de l’idéalisme allemand, il poursuit des recherches consacrées au motif de « l’âme à l’image de Dieu », suivi dans son évolution et sa progressive disparition, de Thomas d’Aquin à Descartes.