Kant en France n’est pas seulement un phénomène de réception : c’est l’histoire même de la philosophie française depuis le début du XIXe siècle. Et pourtant, quoi qu’on ait prétendu à ce sujet, il n’a jamais existé de néo-kantisme français. Cousin, Renouvier, Lachelier, Boutroux, Brunschvicg, Benda n’ont pas la même vision du kantisme. La manière dont ils s’approprient cette référence permet de tracer entre eux tantôt des points de rencontre, tantôt des lignes de clivages et d’opposition. Leur rapport à Kant nous donne un éclairage remarquable sur leurs débats internes.
De plus, Kant déborde les enjeux philosophiques : assimilé au républicanisme, rejeté par les penseurs réactionnaires qui en ont fait leur bête noire, il est devenu malgré lui le point de cristallisation de toutes les batailles franco-françaises, parmi lesquelles on peut citer notamment la querelle de l’école laïque, l’affaire Dreyfus et le conflit récurrent entre germanophiles et germanophobes.
Par voie de conséquence, l’usage savant, l’usage philosophique et l’usage idéologique de Kant interfèrent sans cesse. C’est cet objet un peu étrange que le présent ouvrage se propose d’étudier en le construisant au fil des textes. Il en ressort une histoire de la philosophie française au plus près de ses problématiques singulières, qui furent aussi, à plusieurs reprises, les problèmes de toute une époque.
Georg Olms Verlag – Europaea Memoria
690 pages – 16 × 23,5 cm
ISBN 978-3-487-15666-8 – juin 2018