Ce recueil a pour but de montrer que Heidegger n’est pas seulement, et peut-être pas d’abord, ce penseur solitaire de Forêt-Noire prêtant l’oreille à la voix de l’Être, comme on s’est souvent plu à le présenter, et comme il a sans doute lui-même contribué à le faire accroire : c’est un penseur extraordinairement attentif aux développements philosophiques de son temps, dont la pensée s’est élaborée en grande partie en dialogue non seulement avec les Grecs, la pensée chrétienne, l’existentialisme de Kierkegaard ou encore la phénoménologie husserlienne, mais également avec ses prédécesseurs immédiats (Dilthey, Brentano, Bergson, Braig, York von Wartenburg), les écoles néokantiennes de Bade (Rickert, Lask) et de Marbourg (Cohen, Natorp, Cassirer), ainsi qu’avec certains contemporains, tels Jaspers ou Scheler. Dès ses débuts, sa pensée s’avère ouverte aussi bien aux avancées de la logique mathématique (Frege et Russell) que, plus tard, aux développements de l’anthropologie et de la biologie de son époque (von Uexküll).
Cette mise en perspective, qui nous paraît plus que jamais nécessaire, permet ainsi de mettre en lumière des aspects négligés de l’œuvre, de mieux comprendre les sources et, peut-être, certaines limites de celui qui demeure, malgré l’ombre qui pèse sa pensée, l’un des plus grands philosophes du XXe siècle.
Ont contribué à ce volume : S.-J. Arrien, Fr. Datur, J.-Cl. Gens, S. Jollivet, M. de Launay, M. Michalski, C. Riquier, M. Roesner, Cl. Romano et J.-M. Salanskis