Il serait tentant mais trompeur d’y voir l’illustration du côté noir du Moyen Âge! Ce serait oublier que la Renaissance, qui la première a inventé l’image des âges sombres, a elle-même cultivé et pratiqué la magie, de même que l’astrologie et la démonologie, d’une façon au moins aussi intense même si ces pratiques se sont heurtées à une répression beaucoup plus féroce que dans les siècles précédents. Le vaste parcours historique auquel se livre Graziella Federici Vescovini propose quant à lui une histoire de la magie au Moyen Âge qui doit être en même temps, en partie du moins, une histoire des sciences ou de la philosophie naturelle, tout en examinant ses relations avec la théologie ou la religion. La magie est à la fois une forme de rationalisation des phénomènes, et une altérité sans cesse menaçante pour les sciences et la religion médiévales.
Mais ce qu’il convient avant tout de retenir, c’est la profusion des textes, la multiplicité de questions que la magie pose en toutes sortes de domaines. Une fois reçues les traductions des principaux textes arabes ou hébreux, une fois lancée l’idée de « magie naturelle », une fois mise en doute la possibilité pour les démons d’agir, une fois souligné le rôle de l’imagination, les médiévaux sont en permanence confrontés à telle ou telle de ces questions. Les médecins, les astronomes et astrologues, les perspectivistes, les physiciens même, sans parler des théologiens ont tous un avis sur la nature et les limites de la magie. La magie est ainsi un noeud de problèmes, en même temps qu’un révélateur des positions théoriques. Entre superstition et raison.