Francis Marmande : Le pur bonheur. Georges Bataille

Un mois avant sa mort (1980), Sartre a fait cette étrange remarque  : « Au cours du travail insurrectionnel se produit un déplacement : on l’a vu clairement en 1968, ce n’est plus la sortie, la naissance qui constitue le sens de l’événement, mais la déchirure dans le sens à la fois social et érotique que lui a donné Georges Bataille. »
Plusieurs rencontres avec Francis Marmande sont programmées en librairies, en mai et en juin.

Bataille, l’image de Bataille est souvent vue et transmise avec gravité, sérieux, inquiétude.

Le Pur bonheur de Francis Marmande ne cherche pas à prendre à contre-pied – encore que… En tout cas, pas de la manière que l’on redoute. Georges Bataille (1897-1962) est de mieux en mieux connu  : érotisme, sacré, potlatch, économie générale, non-savoir, athéologie, expérience, souveraineté, l’impossible, le rire, la peur, etc., pas un motif qui ne soit la cible d’études, de publications, de colloques. Le plus souvent utiles. Francis Marmande ne méconnaît pas ces motifs qu’il a lui-même étudiés et parmi les tout premiers. On le sent toutefois tenter de privilégier une autre liste de ceux-ci  : sérénité, quiétude, joie devant la mort, économie exubérante  ; ou encore non-espoir, au sens où Bataille dit calmement, sans morbidité, sans désespoir justement, à Marguerite Duras  : « Je ne suis pas un être qui vit dans l’espoir. Je n’ai jamais compris comment on pouvait se tuer par manque d’espoir. »

Le Pur bonheur aurait pu être le titre de l’un des livres de Bataille lui-même. Il compte en effet au nombre des titres et des projets envisagés puis abandonnés par l’auteur dHistoire de l’œil. Il devient ici celui d’un livre sur Georges Bataille (au sens où Bataille a écrit un Sur Nietzsche). Selon Francis Marmande, Le Pur bonheur se donne pour ambition  : 1. qu’on puisse dire de lui ce qu’on dit de Keith Jarrett  : qu’il est « un pianiste d’avant-garde pour grand public ». Avec le privilège sur l’improvisateur de génie, que la notion d’« avant-garde » a perdu toute pertinence, et celle de « grand public », toute vertu  ; 2. ne se donner aucune limitation  : poésie, geste de l’écriture, manuscrits, présence active de la bibliothèque (chartiste, Bataille était conservateur de métier), transgression, bizarreries, rien qui soit soustrait à une mosaïque de réflexions et de questions. Avec comme principe actif, moteur et dynamique de l’écriture, l’incitation  : « Rien de moins avouable (une si petite raison à l’origine de la décision  !) que la mise en marche d’un écrivain », écrit Bataille  ;

Le Pur bonheur ne cherche pas pour autant le paradoxe. À peine espère-t-il se porter à hauteur de lecture. À hauteur de désir. Rester à la hauteur. À la hauteur de l’étonnement que déclenche chaque nouvelle lecture de Bataille  : phrase saisie au vol, paragraphe perdu de vue, livre qu’on lit comme si on ne l’avait jamais lu.

Les « lectures » sont pourtant nombreuses que ce volume réunit, qui ont paru tout au long de ces dernières années. Toutes ont été corrigées, réécrites, poussant leur corne jusque dans le présent (vives évocations de la bêtise du présent). Roman d’une lecture passionnée, roman d’une époque où lire se ressent du dépassionnement général.

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